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Edmonton Park Pavilions (2011) : 1 même jury pour 5 concours simultanés
par Hugo Duguay , Benoit Avarello, Alexandre Cameron, publié le 2016-01-26
La série de 5 concours Edmonton Park Pavilion a donné lieu, en 2011, à la production de 135 projets provenant de 62 bureaux. Ce n’était pas un concours d’idées, la volonté tangible des organisateurs du concours étant bel et bien de construire cinq édifices publics. Peut-on dire, rétrospectivement, que la ville d’Edmonton s’est véritablement saisie de la thématique symbolique du pavillon dans un parc ? Ce concours fut-il plutôt considéré comme un vaste appel d’offres ? Un regard transversal sur les cinq volets permet de saisir quelques-unes des intentions initiales, au-delà de la volonté affichée du Edmonton Design Committee de « rehausser la barre du design ».

Le concours avait pour objectif de recueillir des propositions pour la construction de nouveaux pavillons centraux dans 5 parcs publics d’Edmonton : Mill Woods Sports Park, John Fry Sports Park, Victoria Park, Borden Park et Castle Downs Park. Tous étaient considérés comme des espaces offerts au public, et chacun d’entre eux devait comprendre des espaces sanitaires et une aire de repos pour les utilisateurs du parc. Dans quatre des cinq sites, le pavillon devait aussi accommoder diverses associations sportives. Des éléments de programme tels que des vestiaires ou des locaux de rangement étaient ajoutés outre les installations fonctionnelles élémentaires, transformant parfois ces pavillons en chalets sportifs.

Aux fins de cet éditorial, trois des cinq parcs sont présentés de manière plus étoffée : John Fry Sports Park, Victoria Park et Borden Park. À noter également que les projets lauréats sont aujourd’hui tous construits — de manière plus ou moins fidèle aux propositions originales du concours — à l’exception du pavillon du parc Mill Woods.

Le projet lauréat du volet John Fry, développé par l’équipe désormais bien en vue de Marc Boutin Architectural Collaborative de Calgary, misait sur l’aspect signalétique du bâtiment afin d’en faire un point de ralliement avant, pendant et après les rencontres sportives. Le projet s’ouvre sur un espace dégagé, pouvant servir aux rassemblements et aux échauffements. L’aménagement est borné par des structures faisant à la fois office de butées, lors des pratiques, et d’éléments signalétiques lumineux dans le parc. La toiture du bâtiment s’ouvre vers le sud, agissant également comme un signal de ralliement tout en protégeant les espaces extérieurs de transition. Cette couverture est soutenue par une série de lanternes numérotées, auxquelles s’oppose un volume de services incluant les vestiaires.

Dans le cas du volet du parc Victoria, le programme exigeait une combinaison de locaux d’administration, d’entraînement et d’entreposage pour la Edmonton Speed Skating Association : fonctions précédemment assurées par d’archaïques remorques laissées sur le site. Le projet lauréat de Rayleen Hill Architecture + Design fut jugé aussi élégant que franc (elegant and straightforward) , et fit l’unanimité parmi les membres du jury. L’étude de la documentation fournie par l’agence démontrait une expérience certaine dans des projets comparables et faisait foi de l’habileté à fournir un résumé ventilé des intentions budgétaires. Cependant, dès la formulation des premières phrases du commentaire du jury concernant la proposition lauréate, le lecteur prend conscience des critères d’évaluation principaux et de l’importance accordée aux aspects budgétaires (« Il y avait de nombreuses propositions séduisantes qui, pour la plupart, ne pouvaient pas rencontrer les contraintes budgétaires ».)

Le projet lauréat du concours pour Borden Park, développé par l’agence gh3, proposait une volumétrie simple générée à partir d’un plan circulaire évoquant le carrousel, infrastructure autrefois présente dans le parc. Cette forme arrondie devait permettre, selon les concepteurs, une bonne intégration parmi les nombreux sentiers sinueux et la création d’un point focal dans le parc : une enveloppe extérieure, constituée de grands panneaux de verre, offrant des vues non seulement vers l’intérieur et vers l’extérieur, mais aussi à travers le pavillon, le tout contribuant à sa lisibilité dans le parc. Dans les documents de projet fournis par les architectes, cette enveloppe est soutenue par une structure de bois concentrique qui amplifie la forme arrondie et positionne le programme en périphérie, générant un espace polyvalent au centre. Cette stratégie structurale tentait clairement de répondre à une demande de flexibilité recherchée par les organisateurs, et fortement suggérée dans la prémisse du concours.

Dès lors, quelle était la question architecturale à l’origine de cette série de concours ? Le dossier de présentation des concours confirme qu’aucun questionnement architectural n’a été formulé, par delà les attentes fonctionnelles, afin d’orienter ou d’inciter une réflexion sur la thématique du pavillon. Ceci explique sans doute la teneur généralement conventionnelle des propositions, nombre de participants n’ayant pas saisi l’opportunité que procure la conception d’un pavillon comme défi disciplinaire ayant jalonné l’histoire de l’architecture de « pavillons de Barcelone » et autres « Folies de La Villette ». Le dossier de présentation offrait bien quelques pistes de réflexion sur la valeur historique des parcs et des pavillons pour la Ville d’Edmonton et en particulier pour les parcs Borden et Victoria. Cependant, comparativement aux principes du pavillon, souvent porteurs d’une redéfinition disciplinaire, les projets issus de ces concours sont finalement presque uniquement axés sur l’aspect programmatique d’une demande, pour ne pas dire d’une commande, réduite à sa plus simple expression en raison de la place prépondérante accordée aux critères budgétaires.

Si l’exercice était à refaire, quels aspects devraient servir de levier pour une série de concours du même genre ? Est-il encore possible d’axer la problématique sur la dimension symbolique, et se servir du pavillon comme d’un édifice expérimental ? L’analyse des propositions — 135 en l’occurrence — révèle que la plupart restaient sages, voire conventionnelles. En comparant les éléments du rapport du jury, la mention récurrente « simple, mais attrayant » (simple but appealing) qualifie de façon générique plusieurs des propositions retenues, dont celle du lauréat de Victoria Park. Une équipe s’est démarquée : le studio gh3, lauréat du volet Borden Park pour l’aspect poétique de sa présentation doublée d’une préoccupation historique marqué. Ils obtinrent également le premier prix pour Castle Downs Park en plus de récolter une mention pour l’audace de leur proposition pour le volet Victoria Park. L’ensemble des soumissions présentées par cette firme ontarienne révèle plusieurs similarités, qu’il s’agisse de la référence au motif iconique de la Hudson Bay Company, ancien propriétaire de Castle Downs Park, de l’analogie aux modes constructifs des Premières Nations pour Victoria Park ou encore de la référence directe à l’ancien carrousel de Borden Park : autant d’aspects qui démontrent une sensibilité à l’histoire autant qu’à la spécificité de chaque site. Le recours à quelques angulations et à d’imposantes surfaces réfléchissantes permit à la firme gh3 de « renvoyer le regard vers le paysage », d’une part pour Victoria Parkavec une multitude d’orientations dirigeant le regard vers différents points d’intérêt, et d’autre part pour Castle Downs avec l’utilisation d’immenses panneaux facettés d’acier inoxydable reflétant le parc et ses usagers.

On peut d’ailleurs se prendre au jeu d’une synthèse des projets de gh3 en vue de formuler un portrait plus précis des réponses attendues pour les concours Edmonton Park Pavilion, car force est de constater qu’en recherchant le caractère historique et paysager inhérent à chacun des parcs, la firme a réussi a formuler au mieux les attentes du jury. De là à considérer que les propositions de cette équipe ont su redéfinir la notion de pavillon pour les concours d’Edmonton, surpassant ainsi les intentions des organisateurs et démontrant que les concepteurs reconstruisent les concours, il y aurait un pas que nous ne saurions franchir ici.

Mentionnons pour conclure, que le concours a été ouvert sur le plan international, mais que sur les 135 propositions, la quasi-totalité provenait de firmes canadiennes, majoritairement de l’Ontario et de l’Alberta, ce qui laisse également dubitatif sur les moyens de communication mis en oeuvre pour attirer les équipes internationales. Notons également que la conception des 5 pavillons a été séparée en concours distincts, mais simultanés, malgré tout évalués par le même jury. Ceci ne pouvait qu’engendrer une certaine ambiguïté quant à la cohérence — recherchée ou non — entre les pavillons, multipliant au passage un déséquilibre quant au temps attribué à leur conception, certaines firmes n’ayant travaillé que sur une proposition, d’autres sur les cinq concours.

Somme toute, il est important de souligner qu’il s’agissait du premier exercice du genre organisé par la ville d’Edmonton, et que le concours constitue, de fait, un précédent historique. Peut-être aurait-il été pertinent de lancer les 5 appels à projets de façon séquentielle, plutôt que simultanée, afin de créer une forme de synergie progressive rehaussant la qualité de site en site, dans une sorte de montée en puissance d’une exploration véritablement architecturale de la symbolique potentielle du pavillon dans un parc du XXIe siècle.

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