« Ilôt des Palais », projet suspendu, patrimoine en sursis
L’après-concours de l’îlot des Palais à Québec aura fait couler, jusqu’à maintenant, bien plus de salive que d’encre chez les architectes. Après l’inattendue résurgence du projet lauréat parmi les récipiendaires des prix d’excellence 2007 de la revue
Canadian Architect et après l’annonce récente de la décision du nouveau maire de Québec d’en suspendre la réalisation, nous sommes forcés d’admettre que l’îlot des Palais reste un dossier d’actualité. Tout n’a d’ailleurs pas été dit, ni compris, de l’histoire rocambolesque du projet, notamment de l’épisode marquant du concours. Deux timides et tardives expositions tenues à Québec, au printemps dernier, n’ont pu faire oublier la publication inexpliquée — apparemment une fuite (...) — d’une version outrageusement remaniée du projet gagnant par le promoteur avant la diffusion de tous les projets soumis au concours. Enfin, ceux-ci sont désormais largement diffusés, dans leur intégralité, grâce au
Catalogue des Concours Canadiens du LEAP. Les défenseurs de la transparence du processus de concours et de l’établissement des conditions qui offrent aux architectes un territoire de contribution à l’édification d’une culture architecturale proprement contemporaine au Québec se réjouiront de constater que « l’architecture potentielle » générée par le concours de l’îlot des Palais retrouve enfin ses droits de « requestionner », publiquement, les questions posées par le promoteur du projet.
Du reste, l’intérêt de la diffusion des projets du concours de l’îlot des Palais réside probablement moins dans les réponses qu’elle fournit aux questions politiques et procédurales qui restent en suspens après quelques manipulations douteuses de l’information suite au concours, que dans le recentrement du propos sur des questions proprement architecturales : Quelles propositions ont émergé de la posture déterministe du promoteur en regard de la commémoration de l’exercice du pouvoir de l’intendant en Nouvelle-France par la reprise, voire la reconstitution, des volumes bâtis qui en exprimait le mieux l’importance historique ? Comment l’approche tectonique caractéristique de la fin du siècle dernier se transforme-t-elle en ce début du XXIe siècle, sous diverses influences, dont celle du numérique ? Sous quelles formes et par quels dispositifs se décline aujourd’hui la contemporanéité du geste architectural dans un milieu aussi sensible et chargé de mémoire ? En dépit du nombre relativement restreint de propositions reçues pour ce concours, des idées intéressantes en regard de ces questions et bien d’autres qu’elles sous-tendent peuvent être dégagées du lot, pour qui sait les décoder. L’exercice est désormais offert à qui veut bien y consacrer un moment.
Pendant que les propositions du concours, resté dans l’ombre pendant plusieurs mois, se dévoilent maintenant sous un nouvel éclairage, l’avenir du site de l’îlot des Palais est en train de se jouer. Des historiens et des archéologues commencent à prendre la plume pour défendre le maintien du projet, pendant que les architectes en discutent en coulisse. Le vieillissement prématuré des vestiges, déterrés et sans protection, soulève maintenant de vives inquiétudes au plan de leur conservation. Ironiquement, les fondations de la première phase du projet, mises en place avant l’arrêt des travaux, ont ajouté une nouvelle couche archéologique à celles en place, qu’il sera peut-être difficile à décoder par les archéologues dans un siècle ou deux... Peut-être, aussi, les quelques dérives de l’après-concours auront-elles laissé quelques séquelles propres à fragiliser, un certain temps, la réputation des concours. Or, si l’archéologie se définit comme la science des choses anciennes, il ne faudrait pas oublier que l’architecture a le pouvoir de forger l’avenir. Il revient à nous, architectes, d’y voir et d’y croire.
Lancé en 2006, le concours de l'îlot des Palais à Québec, visait la restructuration de cet important site patrimonial, comportant, entre autre, les vestiges des Palais de l'Intendant sous le régime français (1760). Le manque de qualification de ce site historique, adossé aux fortifications de la ville, avait fait déjà fait l'objet de plusieurs projets et études afin d'en mettre en valeur les caractéristiques archéologiques et symboliques pour le Québec.
Par ce concours, la Ville de Québec entendait susciter la création d'un pôle culturel et touristique. Le programme proposé aux candidats exigeait la création d'un centre d'archéologie et d'histoire dans deux pavillons installés sur les restes des Palais autour d'une cour d'honneur et d'un jardin, le tout devant être développé dans le respect des principes du développement durable.
Pour se qualifier, les équipes devaient faire état d'une expérience significative et d'un siège social dans la grande région de Québec. La ville s'engageait à retenir les services d'architecture de l'équipe lauréate de la première phase, concernant l'emplacement du premier palais ainsi qu'un aménagement temporaire. Cette première phase du projet devait être complétée pour les festivités du 400e anniversaire de la capitale, tandis que la deuxième phase, portant sur l'aménagement urbain permanent du site et la reconstruction du Palais, devait faire l'objet d'une réalisation ultérieure.
La fin du concours a été marquée par une publication non autorisée d'images différentes de celles fournies sur les planches de concours. Cet incident a eu lieu avant l'exposition tardive des propositions et a suscité des réactions de la part des concurrents, comme en témoigne l'article de Jacques White, conseiller professionnel de ce concours, dans le numéro de mai 2007 de la revue ARQ. Présenté à l'origine par la municipalité comme un legs majeur de la ville dans le cadre des festivités du 400e anniversaire, ce projet a été interrompu par le nouveau maire Régis Labeaume.
(Texte CCC)
Les treize propositions complètes reçues au Service des approvisionnements de la Ville de Québec le 14 novembre 2006 à 14h15 ont été évaluées par le jury en suivant la procédure prévue à l'article 4.1 du règlement du concours. Les sept membres du jury identifiés à l'article 4.2 du règlement se sont réunis à Québec, le 25 novembre 2006, afin d'évaluer collectivement les propositions. Le verdict a été rendu peu avant 19h00. M. Robert Castonguay du Service des approvisionnements de la Ville de Québec assistait à titre d'observateur et Mme Josée Vaillancourt agissait comme secrétaire. Le conseiller professionnel a assisté le jury dans l'exécution de son mandat selon les dispositions prévues au règlement du concours.
La planche 2 de la proposition 3849-6251 a été écartée du jugement (en référence au dernier point de l'article 3.3. du règlement) pour ne pas être conforme à plusieurs des conditions de l'article 3.2 du règlement, particulièrement l'échelle du plan agrandi sur la planche 2 (1:250 plutôt que 1:150) et la coupe agrandie qui est représentée en coupe-perspective (cela avait été autorisé seulement pour l'une des quatre représentations orthogonales en bas de page, en réponse à la question 2.8 le 31 octobre 2006). Le jury considère mineures les autres dérogations relevées sur d'autres planches à l'égard des dispositions des articles 3.2 et 3.3 du règlement.
(Tiré du rapport du jury)