La maison canadienne du futur en ...1954
Avec circonspection et sans nostalgie, le
CCC présente les projets lauréats du concours «
Calvert House pour la maison canadienne de demain», tenu en 1954. 1600 inscriptions pour cet évènement majeur des années 1950, et 661 propositions d’architectes de 17 pays différents. Où en sommes-nous aujourd’hui dans nos projections de la maison du futur ?
Au Canada, les années 1950 voient la réalisation de quelques importants concours de bâtiments publics : la Galerie nationale d’art à Ottawa (1953), l’Auditorium civique de Vancouver (1956) et l’Hôtel de Ville de Toronto (1958), projets bien connus du grand public. Symboles du pouvoir civil, ces projets marquent encore leurs environnements urbains. On ne peut en dire autant des projets du concours
Calvert House, dont la portée domestique forcément limitée ne leur a sans doute pas permis d’établir un espace de reconnaissance dans l’histoire de l’architecture canadienne. Que penser de ce rendez-vous manqué des architectes avec ce « désir de maison » encore très présent aujourd’hui ? Les projets des maisons Calvert ont été publiés dans un catalogue de vente, dans une claire volonté de les rendre accessibles. Il faudrait reconstituer la trajectoire de certains d’entre eux pour mieux comprendre le destin d’une telle ouverture de l’architecture à la domesticité canadienne. Il reste qu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la question du logement est à la une. Les projets retenus dans le concours Calvert (1954) marquent l’entrée de certaines valeurs de l’architecture moderne dans l’espace domes- tique, manifestant une certaine innovation technique et esthétique par rapport aux projets du concours organisé une décennie plus tôt par la SCHL (1946). Un rapide coup d’œil sur ces deux concours documentés par le
CCC permet de mesurer un changement radical. Les maisons traditionnelles présentant des façades décorées, dans le concours de 1946, font place, en1954, à des maisons constituées d’attributs typiquement modernes : toit plat, continuité de l’espace, fenêtres en bandeau, pergolas, compositions abstraites et non symétriques. Faut-il attribuer cette ému- lation à la réputation des membres du jury (les profes- seurs John Bland et Pierre Morency comme conseilleurs professionnels et l’architecte italien Gio Ponti comme président du jury) ? Dans leurs recherches comparatives, les chercheurs du LEAP constatent régulièrement qu’un bon concours dépend aussi d’un bon jury.
Parrainé par l'école d'architecture de l'université McGill et Calvert's Distillers Ltd, le concours Calvert House a sans aucun doute été l'un des événements les plus importants de la scène architecturale canadienne dans les années 1950. Ouvert aux étudiants et aux professionnels du Canada et de l'étranger, le concours visait à définir la forme future de la maison canadienne pour les familles à l'aube du baby-boom. Doté d'un prix de 12 000 dollars, le concours a attiré 1 600 participants. Au final, 661 propositions provenant de 17 pays différents ont été rendues.
Les conseillers professionnels du concours étaient John Bland, directeur de l'école d'architecture de l'Université McGill de 1941 à 1972, et Pierre Morency, directeur de la section architecture de l'École des Beaux-arts de Montréal. Le jury était composé de l'architecte et designer italien Gio Ponti, rédacteur en chef du magazine Domus, du professeur Eric Arthur de l'École d'architecture de l'Université de Toronto et de l'architecte et urbaniste Hemphrey Carver de la Société canadienne d'hypothèques et de logement. La généreuse bourse de 12 000 dollars a été divisée en un prix international de 5 000 dollars, un prix européen de 2 500 dollars, un prix canadien de 2 500 dollars et dix mentions honorables de 200 dollars chacune.
Selon Samuel Bronfman, président de Calvert Distillers, « le concours international des maisons Calvert a été conçu comme une contribution positive au développement de la vie canadienne et comme une aide aux jeunes Canadiens dont le mode de vie est fortement influencé par leur environnement familial. Le foyer et la maison jouent un rôle considérable dans la formation de notre société... » (1). Le programme du concours exigeait une maison unifamiliale à chauffage central pour cinq personnes (dont trois enfants de moins de 15 ans). Des dispositions ont été prises pour la voiture familiale, mais aucune exigence n'a été formulée en ce qui concerne le budget ou les matériaux. Les seules spécifications étaient qu'elle « devait être de bon goût, de conception simple et de couleur agréable, sans être difficile à entretenir ni trop coûteuse à construire ». (2)
Eric Arthur, membre du jury, a déclaré que « le concours était précieux pour deux raisons. Il a permis de découvrir un niveau de qualité de dessinateur européen incommensurablement plus élevé que tout ce que nous connaissons dans ce pays ou aux États-Unis. Il nous a également donné l'occasion de "nous voir comme les autres nous voient". On peut comprendre la difficulté de visualiser la maison canadienne de demain alors que son auteur est assis au bord d'un fjord norvégien ou sur les rives d'un loch écossais. Cette difficulté n'est que légèrement atténuée par le fait d'être assis sur les rives du lac Ontario ou sur un sommet de Banff. En conséquence, le jury et les concurrents ont pu se libérer avec bonheur des règles frustrantes des règlements municipaux, ou même de la prise en compte des matériaux que l'on trouve habituellement dans les sections suburbaines des centres métropolitains du Canada ». (4)
Dans son rapport, le jury a reconnu dans les trois projets lauréats « principalement un haut degré de simplicité et de style, une interprétation très humaine de la vie d'une famille en termes moraux et spirituels qui est donnée par l'intimité du premier, tandis que dans les deux autres elle est donnée par une courageuse confiance avec la vie extérieure, plus vivante dans l'un et plus calme dans l'autre ». (3)
En soulignant la simplicité tant au niveau des plans proposés que de l'esthétique, le jury a admiré la flexibilité des plans qui permet parfois une variété de configurations intérieures. Le jury a également noté que dans la majorité des projets, les salles d'eau intérieures et les cuisines s'ouvraient sur les salles à manger, mais pas sur l'extérieur. En outre, l'évacuation des déchets et l'arrivée des marchandises n'ont pas fait l'objet d'une attention particulière. Malgré cela, l'accent a été mis sur l'espace dédié aux enfants et à leurs jeux. En regardant les projets avec des yeux contemporains, nous pouvons simplement dire qu'ils démontrent l'arrivée d'un ensemble de nouvelles habitudes et valeurs familiales qui, depuis la Seconde Guerre mondiale, ont apporté d'importants changements dans le logement canadien.
À la suite du concours, une publication intitulée « Winning Designs » (1955), présentait les plans et les perspectives des treize meilleurs projets, offrant ainsi au citoyen lambda la possibilité de choisir et d'acheter l'une des propositions.
Malheureusement, nous n'avons pas pu trouver d'informations sur les projets autres que les lauréats. Selon toute vraisemblance, leurs dessins ont été perdus et nous ne saurons jamais en quoi consistaient leurs propositions. D'après des coupures de presse de l'époque, nous savons que l'un des projets proposés était une maison en forme d'igloo. Nous pouvons supposer qu'il y avait un certain nombre de propositions excentriques et même quelques-unes qui étaient peut-être trop innovantes pour que le jury les prenne en considération, en gardant à l'esprit les exigences de constructibilité mises en avant par les organisateurs du concours. Plus important encore, il serait bénéfique de découvrir quels sont les projets gagnants qui ont été construits à travers le pays et à quelle fréquence. Leur incidence nous donnerait une meilleure idée de l'influence de ce concours sur le paysage de l'environnement domestique canadien. Il va sans dire que nous n'avons fait qu'effleurer ce concours.
(Texte CCC)
Notes:
(1) Winning designs: International Calvert House Competition for the Canadian home of tomorrow. Montréal, Calver Distillers, 1955. 16p, ill.
(2) Architectural Record, vol. 115, January 1954.
(3) Architectural Record, vol. 116, August 1954.
(4) Journal of the Royal Architectural Institute of Canada. August, 1954.
Président du jury |
Gio Ponti, Architecte
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Jury | Eric Arthur, Architecte |
| Humphrey Carver, Urbaniste |
| Gio Ponti, Architecte |
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15 décembre 1953 : Conditions sont émises
14 mars 1954 : Date limite de notification de l'intention de concourir
1er avril 1954 : Date limite de dépôt des projets
20 mai 1954 : Jury
Août 1954 : Résultats du concours
(Tiré du règlement du concours)
Concours Calvert House pour la maison canadienne de demain, Architecture contemporaine dans le monde. Architecture d'aujourd'hui, 1955
International Calvert House Competition, Journal of the Royal Architectural Institute of Canada, 1954
Calver Distillers, Winning designs: International Calvert House Competition for the Canadian home of tomorrow, 1955
Calvert Distilleries, Plans primes: Concours Calvert House pour la maison canadienne de demain, 1955
Les 3 gagnants du concours international Calvert House, Architecture bâtiment construction, 1954
Commentaires sur le jugement et le concours, Architecture bâtiment construction, 1954
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