Canadian Small House Competition (1946) : la première initiative d'après-guerre de la SCHL
Lancé en 1946 par la Société centrale d’hypothèques et de logement (SCHL), le concours d’architecture de maisons encourageait les architectes canadiens à concevoir des habitations individuelles novatrices et abordables. Ce concours d’idées ne reçut pas moins de trois cent trente et une propositions. Bien que, comme le souligne le jury, l’élite de la profession architecturale ne fut pas au rendez-vous, trente-sept projets furent retenus à travers le pays. Cette première initiative historique nous replonge dans la dynamique que la SCHL tente de créer au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, afin de répondre aux besoins de logement des Canadiens.
Maintes familles canadiennes cherchaient à s’installer dans des maisons unifamiliales à la fois abordables et bien conçues dans cette période de reprise après guerre. Afin de répondre à cette demande, le concours portait ses efforts sur la conception de plans fonctionnels, « sains et novateurs » en adéquation avec les besoins d’une famille de quatre personnes, mobilisant de nouvelles techniques de construction ainsi qu’un budget d’environ 6 000 dollars canadiens : soit environ 77 000 $ en 2015.
En cette rude période de pénurie matérielle, les architectes avaient pour défi de concevoir des espaces domestiques à moindre coût répondant à plusieurs consignes telles que : espace intérieur lumineux, mobilier intégré, et chambres suffisamment vastes afin qu’il soit possible de surveiller les enfants tout en s’adonnant aux tâches domestiques. Les parcelles étudiées étaient définies comme nivelées — plane donc — et pouvant comporter jusqu’à 40 pieds de largeur. Le rapport du jury souligne d’ailleurs que la question de la superficie d’occupation fut considérée comme un aspect fondamental, sachant qu’un bungalow occupe une part importante du terrain tandis qu’une maison de deux étages se révèle plus économe en terme de superficie du toit et du terrain.
Cette initiative, approuvée par l’Institut royal d’architecture du Canada, vit le jour dès la constitution de la Société centrale d’hypothèques et de logement (désormais la Société canadienne d’hypothèques et de logement) en 1946. La SCHL, se voulant être le médiateur entre les propriétaires et les architectes, fut fondée afin de mener à bien la Loi nationale sur l’habitation adoptée deux ans plus tôt.
Des prix et des mentions spéciales furent décernés dans chacune des cinq régions (les Maritimes, le Québec, l’Ontario, les Prairies et la côte Ouest). Soulignons que l’équipe du
CCC n’a été en mesure de rassembler que le matériel documentaire en lien avec les trente-sept propositions retenues. Le jury, composé notamment de Humphrey Carver et d’Ernest Cormier, a convenu que les résultats du concours constituaient une étude exhaustive des diverses façons d’assembler les éléments du plan constituant la petite maison, qu’à l’évidence les agencements soumis étaient le fruit d’un travail rigoureux, sans que ne ressorte de différence notable entre les régions, ajoutant à ce regret qu’une proposition soumise pour une région pourrait très bien convenir à une autre.
Rétrospectivement, il semble que la région des Maritimes se soit distinguée, bien que les envois n’aient donné lieu qu’à l’attribution de deux mentions spéciales — là où les quatre autres régions en attribuèrent cinq — et le premier prix des Maritimes, attribué à G. Burniston & J. Storey, fut considéré comme faisant partie des meilleures propositions. Celle- ci proposait de grandes ouvertures vitrées orientées plein sud permettant à une quantité maximale de lumière de pénétrer dans la salle à manger. Par ailleurs, les deux propositions de Michael G. Dixon présentées pour les Maritimes et le Québec ont également attiré l’attention du jury. Une proposition de salle de jeux pouvant évoluer en chambre à coucher au fil du temps, de même que l’agencement de non seulement deux, mais quatre chambres à coucher, furent reçues comme des approches novatrices. Dans la région des Prairies, des propositions notables avançaient l’idée d’adjoindre un coin-repas à la cuisine ou de concevoir un vaste espace englobant la salle de séjour, la salle à manger et la cuisine. Tandis que la proposition de David J. Moir pour la région du Québec faisait distinctement écho à l’architecture domestique traditionnelle québécoise, rien de marquant ne ressortit des plans proposés pour la côte Ouest. Une des soumissions fit cependant l’objet de controverse : celle de E. A. Mulford, pourtant estimée pour ses caractéristiques uniques, ne pouvant être reçue comme une solution abordable, élément essentiel du cahier des charges. Harry Leblond, plus acerbe, la qualifiant de
West Coast type bungalow bon marché.
Au final, le jury déplora que le concours n’ait pas donné lieu à l’élaboration de nouvelles techniques de construction et, estimant que la très faible participation des grandes firmes d’architectures pouvait être attribuable à une certaine « pression exercée par le monde des affaires », on préféra souligner les efforts déployés par les participants, affirmant de surcroit que les trois premiers prix de chaque région assureraient à « Monsieur et Madame Canada », clients aussi fictifs qu’improbables de la SCHL, la construction future de leur maison unifamiliale novatrice et abordable. À la fois élogieux et quelque peu teintés de déception, les commentaires des membres du jury, se révèlent aujourd’hui comme les prémisses d’une politique qui donnera naissance à la recherche de nouveaux lieux d’habitation. En effet, ce concours historique sera le point de départ d’une série de recherches de nouveaux modèles qui demeureront au coeur du mandat de la SCHL. Un an plus tard, le jeune organisme publiera
67 Homes for Canadians, sous la forme d’un recueil qui présentera les trente-sept modèles retenus lors du concours en évoquant trente compositions supplémentaires, afin de fournir à la fois des renseignements généraux utiles, ainsi que des plans « attrayants et bons marchés » aux futurs bâtisseurs.
Pour une compréhension historique de la place de ce concours dans la politique de la SCHL on renverra à la section historique de son site web.
67 homes for Canadians
ftp://ftp.cmhc-schl.gc.ca/chic-ccdh/HousePlans/CA1%20MH%2047S37_w.pdf
History of CMHC
https://www.cmhc-schl.gc.ca/en/corp/about/hi/index.cfm
Ce concours a permis la production d'une variété extraordinaire de plans. Les participants ont permis de faire une étude exhaustive des multitudes de façons d'organiser l'espace intérieur d'une petite maison. Dans les concours précédents, nous avons noté une propension à se concentrer sur la conception d'extérieurs attrayants alors que dans ce concours, les designers se sont visiblement concentrés plus sérieusement sur les plans intérieurs. Leur qualité était supérieure à la forme dans laquelle ils étaient insérés. La force de ce concours résulte peut-être même dans la variété des caractères architecturaux proposés, s'éloignant de l'apparence orthodoxe habituelle. Les juges doutent cependant que la forme du plan se soit distinguée selon les différentes régions. Il est possible que les concepts proposés dans une région aient aussi pu être appropriés dans une autre région. La qualité générale des propositions n'a pas été à la hauteur des attentes initiales. Les juges ont été relativement déçus de voir que plusieurs grandes firmes d'architectes n'ont pas participé au concours. Cependant, il semble évident pour les juges qu'une réflexion fondamentale sur la planification de petites maisons a été amorcée. Plusieurs discussions sur la capacité des entrepreneurs à réaliser ces concepts ont eu lieu. Il a été reconnu que plusieurs designs proposés exigeraient une supervision accrue et le recrutement d'hommes de métier expérimentés. Cette prise de conscience a soulevé la crainte que pour ces designs, le recrutement d'une firme de second rang pourrait mener à des résultats douteux. Une question fondamentale a aussi été celle d'utilisation du lot, puisqu'une maison de type bungalow occupe une grande proportion alors qu'une maison sur deux étages permet d'économiser sur la superficie du toit ainsi que l'espace non bâti sur le terrain. Les juges ont préféré les propositions avec un sous-sol, compte tenu de l'importance des espaces de rangement dans les maisons de petites dimensions. Les autres points examinés avec soin par le jury ont été la connexion de l'entrée principale avec le reste de la maison. Les juges ont préféré les propositions qui n'utilisaient pas le salon comme un espace de passage et qui plaçaient la cuisine à un endroit stratégique et facile d'accès. La question du garage a soulevé quelques difficultés. Les plans occupant la majeure partie du terrain obligeaient les architectes à place le garage soit devant, soit derrière la maison, assumant que les municipalités possédaient des voies de circulation derrière la maison. Aucune de ces dispositions ne semblait vraiment satisfaisante. Un autre facteur important à considérer était le coût d'entretien de la maison. Un design avec un toit simple était de ce fait plus avantageux. Les juges croient que les plans gagnants dans chaque région offriront aux Canadiens des concepts intéressants et nouveaux pour la construction de leur future maison. Espérant que la tenue d'autres concours de ce genre permettra de stimuler l'intérêt pour l'architecture des maisons exprimant le mode de vie canadien, les juges considèrent que ce dernier concours a valu la peine même si aucune technique ou aucun matériau innovateur n'a été proposé. La grande participation à travers le pays est très gratifiante, étant donné que trois cent trente-et-un concepts ont été soumis pour évaluation.
(Tiré du rapport du jury)
(Traduction automatisée non officielle)
67 homes for Canadians : attractive house plans designed especially for Canadian requirements : including prize winners of the Canadian Small House Competition, 1947
Coutu, Simon, Ode au bungalow, 2013
Lawson, Harold; Carver, Humphrey; Cormier, Ernest; Fairn L.R.; Fredk, William; Green, L.J.; Ingles, Ernest B.; McQueen, Monica; Riddell, W. Bruce, Report of the judges : Canadian Small House Competition, Royal Architectural Institute of Canada, 1947
Teodorescu, Ioana, Big Ideas, Small Houses, 2009