Le projet de l'îlot des palais, par sa valeur d'évocation historique et dans son rôle de pôle culturel et urbain, s'énonce ici en deux paysages distincts superposés : le paysage de la cour d'honneur ancrée au coeur d'une nouvelle enceinte construite est posée au-dessus d'un second paysage constitué d'un musée qui se perpétue dans des jardins de vestiges qui assurent la continuité du tissu urbain contemporain.
L'emplacement dans la ville et la création d'un paysage
Les documents historiques qui nous renseignent sur l'existence passée de l'intendance nous montrent hors de tout doute qu'au-delà du bâtiment, le pouvoir qu'exerçait l'intendant était porté par un paysage articulé et savant. Aussi, proposons-nous de mettre au centre de notre démarche la création d'un paysage fédérateur qui calibre délicatement les oppositions que sont évocation historique et fonctions contemporaines. Le nouvel ensemble, à travers tant une matérialisation différenciée des bâtiments que dans la définition précise des espaces publics aura pour tâche de raffermir les liens physiques qui autrefois liaient ce lieu avec la ville de Québec tout en marquant l'imaginaire contemporain.
L'organisation spatiale
Afin d'évoquer l'enceinte de l'époque du second palais tout en favorisant la fluidité des espaces publics avec le tissu environnant, nous avons tiré profit des dénivellations importantes du site et institué deux niveaux civiques superposés aux caractères fortement différenciés.
Un niveau inférieur, qui prend sa source sur les rives de la rue Saint-Nicolas descendant doucement vers le niveau des vestiges du premier palais, crée une place triangulaire dont le plan incliné permet de mettre au jour des vestiges qui surgissent comme autant de témoins de l'histoire. Ce niveau devient celui de l'entrée du musée. Sous la cour d'honneur, il traverse un grand hall pour ré-émerger de l'autre côté fournissant une seconde entrée aux groupes en provenance des autobus le long de la rue Vallière.
Un niveau supérieur naît du plateau de l'actuelle rue De Saint-Vallier Est dans une importante porte cochère taillée dans le nouveau pavillon Jean-Talon et descend doucement vers le niveau original qu'avait le second palais de l'intendant où l'on retrouve une cour d'honneur configurée à la manière classique, c'est-à-dire appuyée latéralement par les avancées du palais prolongés par des jardins latéraux meublés de topiaires. Ce grand axe majestueux culmine dans un escalier monumental qui mènera les dignitaires au «piano nobile» lors d'activités protocolaires.
La répartition générale rétablit un ordre géométrique clair dont la mise en oeuvre permet un précis contournement des murs de la caserne existante le temps des travaux, tout en offrant un panorama d'inspiration classique aux nombreux visiteurs dont le premier contact visuel avec l'îlot des palais se fera de la Haute Ville.
Un centre pour le découverte
L'amorce de la visite du musée d'histoire et d'archéologie commence sous la cour d'honneur, dans un vaste hall d'accueil qui permet aux visiteurs seuls ou en groupe de se diriger soit vers le second palais, soit vers le pavillon Jean-Talon mais surtout vers la salle multimédia où commence la visite prévue. Cette salle centrale est conçue de façon à offrir une expérience collective dans un espace circulaire dont la verticalité étonne et dont la configuration permet une polyvalence d'usage ainsi que celle nécessaire au renouvellement des présentations. À la sortie du spectacle d'introduction, une percée dans la paroi du pavillon Jean-Talon nous permet d'aborder la découverte des vestiges.
Une halle pour les vestiges
Au-dessus des vestiges et protégeant également sous son grand toit de limon gris la maison Fraser à l'est et une partie de l'ancienne rue De Saint-Vallier au sud, une grande halle de lumière tamisée franchit la presque totalité de l'îlot vers l'ouest sans en perturber le précieux sous-sol. Cette halle de géométrie simple se posant en contrepoint de la complexité formelle des vestiges oppose son assemblage précis de pierre ajouré à l'apparent chaos rustique des ruines. La nuit, un savant éclairage des vestiges appuyé par une mise en lumière perçant à travers l'ensemble de la coque du bâtiment rend spectaculaire la présence du passé dans le présent.
Dans cette halle, un parcours muséologique est privilégié sans exclure la possibilité offerte aux visiteurs avertis de le court-circuiter. Ce circuit se déploie sur quatre niveaux suspendus au dessus des vestiges et offre à chacun une expérience déférente.
Le premier niveau, celui des vestiges permet d'en découvrir la matérialité. Ici, bois brûlé, pierre friable du coteau, pierre grise ou brique récente sont visibles de près et certains sont mis à la disposition du toucher.
Au-dessus, une longue passerelle permet, au second niveau, de parcourir l'ancienne rue De Saint-Vallier comme l'aurait fait un passant trois siècles plus tôt.
Des ouvertures murales des magasins du roi, les vues sur certaines pièces sont commentées.
À l'extrémité est, la maison Fraser devient un lieu ouvert sur la halle où des moyens muséographiques plus traditionnels peuvent être mis en place.
Longeant la paroi opposée de l'ancienne rue De Saint-Vallier une vue aérienne des vestiges à partir d'une mezzanine permet de comprendre les périmètres successifs des bâtiments qui se sont succédés sur le site. Un coup d'oeil vers le nord nous fait découvrir une évocation grandeur nature du passé : le second palais de l'intendant et sa cour d'honneur.
Au quatrième niveau sont exposés l'ensemble des artéfacts que les fouilles ont permis de mettre au jour. De cet espace plus clos, une passerelle translucide et aérienne franchit la porte cochère pour nous mener à la salle des expositions temporaires. Au terme de cette visite, un escalier situé au-dessus de l'ancienne rue De Saint-Vallier nous ramène au point de départ dans un parcours ponctué par la salle polyvalente et un restaurant aux premières loges d'une vue panoramique sur la cour d'honneur.
La géométrie simple et le système constructif éprouvé de cette halle sont en soi les gages d'une faisabilité technique et économique de l'ensemble.
Un nouveau palais et ses alentours
Bien que le projet proposé pour la phase 1, par sa géométrie inclusive et son respect intégral des niveaux existants garde toute sa pertinence sans la reconstruction du second palais, notre interprétation de sa mise en oeuvre reconnaît certaines valeurs qui sont complémentaires à l'ensemble. Ainsi, prenant acte de la volumétrie et de l'ordonnancement des ouvertures originales, l'expression contemporaine du second palais se manifeste à travers les assemblages épurés des matériaux traditionnels dans une unité chromatique lumineuse qui le fait ressurgir du passé pour s'inscrire dans le présent. Lié par une géométrie classique aux allégories paysagères de l'espace public extérieur qui le contourne, il ravive en un lieu urbain contemporain l'esprit qui animait cet espace civique sous le Régime français. Conscient que la reconstruction de second palais est un geste à forte charge symbolique tant pour l'histoire de la Nouvelle-France que pour l'avancement de la connaissance architecturale, il va de soi que le défi fascinant qui est ici posé en est un de documentation, de consultation et de véritable orfèvrerie des assemblages.
Prendre à la ville et donner à la ville...
Les fouilles archéologiques entreprises sur ce site majeur pour la compréhension de notre histoire aboutissent aujourd'hui à la mise en chantier du projet de l'Îlot des palais. Depuis ce lieu est née l'idée de pays et autour s'est construite la ville. Nous y retournons maintenant pour construire à même la matière que nous y avons puisée, un nouvel espace urbain porteur de mémoire que nous lèguerons aux générations futures. Au-delà des questions techniques et matérielle mais sans les exclure, nous croyons que cette rencontre entre la compréhension du passé et les ambitions profondes d'aujourd'hui constitue la véritable nature du développement durable.
(Tiré du texte du concurrent)
3e prix : 6324-1758, L'Architecte Jacques Plante / Schème / St-Gelais Montminy + Associés
Ce projet a capté l'attention pour l'audace d'une implantation longiligne qui reprend la logique des nouvelles casernes au sud et pour l'utilisation innovante de la pierre. La récupération du sous-sol de la cour d'honneur, pour en faire un lieu d'accueil centralisé et préserver du coup un grand dégagement devant le second palais, a été appréciée par certains membres du jury mais n'a pas convaincu tout le monde, notamment à l'égard des rampes. Le traitement monolithique de l'enveloppe (murs et toiture) est apparu intriguant mais probablement un peu trop caricatural. Le recouvrement de la maison Fraser par la même grande coque a été considéré comme une exagération. La composition géométrisée de la place a l'avantage d'être franche, mais la banalité qui en résulte rend l'espace public central peu convivial. Étonnement, les deux pavillons en vis-à-vis de part et d'autre de cet espace n'entretiennent pas de dialogue. La résistance à engager une réflexion sur le traitement du second palais y contribue probablement, donnant l'impression de décalage trop important dans le traitement des deux pavillons et provoquant un déséquilibre de l'ensemble. En définitive, le concept est apparu intéressant par sa vigueur et la franchise du geste, mais le manque de nuances dans son traitement en limite paradoxalement la force d'évocation.
(Tiré du rapport du jury)
16 numérisés / 16 accessibles
- Planche de présentation
- Planche de présentation
- Photographie
- Perspective
- Plan
- Plan
- Coupe
- Croquis de conception
- Coupe
- Perspective
- Perspective
- Coupe
- Plan
- Plan
- Plan
- Coupe