UN LIEU DE RAYONNEMENT VIVANT ET EFFERVESCENT DANS LA VILLE
CONSTATS : MÉMOIRE ET PATRIMOINE
La visite de ['église Notre-Dame-de-Protection et la rencontre avec les promoteurs de l'Agora des Arts ont mis en évidence l'importance de cet édifice, première église érigée à Rouyn-Noranda en 1931. Sa signification tient en partie à son style d'inspiration Art déco, mais encore plus à l'attachement social et culturel qu'ont les citoyens pour ce lieu de célébrations, de rencontres, d'échanges, de spectacles et de festivités. Cet attachement profond se traduit encore aujourd'hui par l'utilisation de la nef lors de mariages et d'autres événements familiaux et communautaires, qui ramènent des gens de toutes les générations dans ce lieu qui les a vus grandir et qui a marqué les étapes de leur vie.
Pour notre équipe, le maintien du volume de la nef et du portique (narthex) est essentiel. Ce volume typique, avec sa voûte et ses bas-côtés, caractérise fortement l'Agora des Arts. Il est reconnu pour ses qualités acoustiques et constitue un lieu familier pour les spectateurs. Il nous semble donc fondamental d'en conserver les qualités spatiales les plus importantes et de ne pas les dénaturer par une accumulation de fonctions de service. Celles-ci gagneront en efficience en étant judicieusement relocalisées ailleurs. Libéré de contraintes fonctionnelles et de reconfigurations spatiales malheureuses, le portique de l'église restera ainsi vivant, lumineux et surtout appropriable.
Dans la même logique, le maintien de l'escalier extérieur (reconfiguré pour s'adaptera notre proposition urbaine) démontre notre volonté de préserver ce patrimoine architectural et social sans le dénaturer, mais en lui ajoutant de nouvelles dimensions, de nouvelles appropriations et de nouvelles incarnations, qui deviendront mémorables pour les prochaines générations. Figure urbaine symbolique, l'escalier est en effet un lieu de spectacle en soi, où le visiteur devient acteur et se met en scène par ses vêtements, sa démarche, ses actions, ses attitudes. Le specta(c)teur se montre à la rue et la rue le regarde : il affirme ainsi sa présence, voire même son existence! Situé en plein coeur du quartier des spectacles / du vieux Noranda, l'escalier de l'église agit comme un lieu de repos, une halte anticipée pour les promeneurs et un lieu de rendez-vous. La décision de maintenir le volume de la salle et l'escalier en repensant leur utilisation pour les offrir au public de façon optimale, est donc primordiale : elle constitue le coeur de notre démarche architecturale.
APPROCHE URBAINE : UNITÉ D'ACTION
L'Agora des Arts n'est pas seulement un nom, c'est un lieu : un lieu de rencontre avec la ville et un lieu de rencontre avec les arts, l'agora, duquel l'organisme de diffusion tire son nom, trouve sa matérialisation dans l'expression d'une place urbaine - lieu de vie et d'animation artistique - à l'intersection de la 7e rue et de l'avenue Murdoch. De part et d'autre de l'escalier de l'église, le parterre gazonné sera ramené au même niveau que celui du trottoir. A l'est, ce trottoir bordant deux rues se prolongera par une esplanade minérale, appropriable été comme hiver et de façon tant spontanée qu'organisée. L'esplanade crée un contact permanent et direct entre le promeneur/spectateur et le lieu de spectacle. Insérées entre des pavés aux tons variés, des dalles de granit rouge polies y réfléchissent la lumière et dynamisent la surface. À l'ouest, une placette minérale prolongera l'esplanade et accueillera la sculpture Inflexion (les guitares). Placée en retrait, une discrète porte d'issue donnant accès à la salle de répétition est dissimulée dans le nouveau parement métallique qui revêt la fondation de l'église. À l'occasion, cette porte permettra l'accès direct à la salle de répétition. Elle pourra aussi servir de débarcadère pour de petits éléments de décor ou des coffres de tournée.
L'esplanade est bordée par une longue marquise végétalisée qui prolonge visuellement l'escalier de l'église jusqu'à la 7e rue. En toute saison, les autobus pourront se stationner devant elle, en enfilade, et laisser descendre leurs spectateurs jeunesse en toute sécurité pour s'y regrouper avant d'entrer au théâtre. Les visiteurs s'amuseront sans doute de voir leurs corps et leurs mouvements se réfléchir dans le plafond miroitant de la marquise. En plus de constituer un refuge contre la pluie ou le soleil, la marquise pourra aussi agir comme billetterie temporaire, comme lieu de rencontre, d'information et de services lors de festivals ou d'événements programmés ou pop-up, et comme abri permanent pour le piano public en attente d'un musicien de passage. La marquise sera le support à la signalétique de l'Agora des Arts, à l'affichage des spectacles, à l'éclairage extérieur et à la sonorisation d'animations. Reconstruit et reconfiguré, l'escalier de l'église se déploiera vers l'esplanade par un emmarchement en gradins, permettant aux spectateurs de s'y asseoir et de profiter confortablement de l'animation ou simplement d'y casser la croûte. Les parois verticales supportant l'escalier seront bardées d'un revêtement d'aluminium peint rouge, marquant sans ambiguïté la vocation de lieu de spectacle de l'ancienne église.
Sans entraver les vues sur l'église ou les projections nocturnes qui sont souvent présentées sur sa façade, la marquise matérialise de façon subtile l'idée de seuils mise de l'avant dans notre approche conceptuelle initiale. S'inscrivant en réponse â l'avancée du rez-de-chaussée du presbytère, elle propose un espace transitoire entre l'esplanade minérale et le parterre gazonné. Avec ses grandes épinette, le parterre est conçu comme un jardin contemplatif, en marge de l'activité urbaine de la rue, offrant aux usagers un espace de détente ombragé et un lieu d'animation calme et discret. Des aménagements paysagers simples et des bancs amovibles permettront de profiter de projections sur la nouvelle façade, voire de soirées de cinéma en plein air. Esplanade minérale, marquise et parterre gazonné se présentent donc comme des séquences urbaines identifiables et appropriables par différents publics et selon différentes occasions et saisons.
APPROCHE ARCHITECTURALE: UNITÉ D'INTERVENTIN
La frugalité du budget de construction est déterminante dans la décision de notre équipe de concentrer tous les efforts organisationnels, spatiaux et constructifs dans un seul et même endroit, qui communiquera la nouvelle vocation culturelle de l'église. La bande étroite comprise entre le presbytère et l'église (occupée actuellement par b sacristie et le garage) constitue la zone d'interventions prioritaire du projet. Cette bande interstitielle sera reconstruite avec ampleur et théâtralité, de l'avenue Frédérique-Hébert jusqu'à la marquise, qu'elle rejoint au niveau de l'entrée principale.
Lieu de transition par excellence, pleinement fenestrée sur deux niveaux et laissant complètement transparaître la façade Est de l'église Notre - Dame-de-Protection, cette bande de lumière large de 3.6 m devient la nouvelle image publique de l'Agora des Arts et assure la présence architecturale et signalétique du promoteur/diffuseur dans la ville. Elle constitue une sorte de «bande servante», qui regroupe tous les locaux d'appoint (vestibule d'entrée, escalier principal, foyer latéral, escalier d'issue, ascenseur, rampe, passerelle et corridor de jonction, réseaux électrique et mécanique). Elle vient ainsi en appui aux «bande servies» que sont les espaces nobles de l'église (portique/foyer principal et nef/salle de spectacle). Ces espaces remarquables conserveront leur pureté formelle et leur autonomie d'usage, sans excroissances techniques ou fonctionnelles, et demeureront reconnaissables pour le public.
Située de plain-pied avec l'esplanade minérale, l'entrée principale est positionnée au tout début de la bande lumineuse, là où se rencontrent la marquise et le palier supérieur de l'escalier extérieur. Elle est surplombée et protégée par la saillie de la bande de lumière au premier étage. L'entrée donne accès à un vaste vestibule en marge duquel se trouve la billetterie permanente, premier lieu d'accueil du public, d'information et de contrôle du théâtre. Le bardage métallique de l'escalier extérieur se poursuit à l'intérieur de la bande de lumière, surtout le mur de fondation de l'église. Ce revêtement contribue à intégrer l'extérieur à l'intérieur et à unifier les deux étages en marquant la présence de l'escalier intérieur principal. Depuis l'entrée, l'escalier principal se déploie en longeant la façade de brique de la nef. Il aboutit sur une passerelle qui surplombe le jardin contemplatif et qui mène au foyer et à la salle de spectacle. Cet espace appropriable est en quelque sorte une antichambre au foyer, où l'on peut contrôler les billets et où l'on peut aménager des tables de tables de bar avec tabourets, des expositions temporaires, un piano pour des concerts du dimanche, etc. Escalier et passerelle définissent ensemble un parcours sans cesse changeant, qui accueillera les visiteurs sans les confinera un lieu spécifique, et qui leur permettra de rejoindre de façon simple et agréable les services au public situés au sous-sol.
Placée parallèlement à l'escalier, le tong la façade vitrée, une rampe en pente douce complète le parcours en donnant accès au sous-sol et à la salle de répétition, le vestiaire et les sanitaires, les toges, le salon vert, la cuisine/salle de conférence ou de production et les salles de mécanique et d'électricité. La rampe mène aussi vers l'ascenseur de haute capacité pour les visiteurs â mobilité réduite et pour le passage occasionnel des coffres de tournée ou des livraisons d u bar. En continuité de cette première rampe, une autre plus étroite dessert le sous-sol du presbytère et la deuxième salle de répétition.
Le positionnement judicieux de l'ascenseur/monte-charge est la clé de l'organisation fonctionnelle du projet. S'ouvrant sur deux côtés, celui-ci relie tous les niveaux et de mi-niveaux (sous-sol, débarcadère sur l'avenue Frédéric-Hébert, passerelles, salle, scène et mezzanine de rangement). Il permet ainsi d'éliminer l'ascenseur passagers et la plate-forme au nez de la scène prévus au PFT. Cet équipement versatile confère de plus une grande flexibilité à la salle de spectacles et à la salle de répétition, en y rendant possible, de façon simultanée, la tenue d'évènements publics distincts. En combinaison avec les deux rampes, l'ascenseur permet également de desservir aussi bien le sous-sol du presbytère que l'esplanade minérale. On pourrait par exemple aisément déplacer l'un des pianos du foyer vers la salle, la scène, la salle de répétition ou même l'esplanade, lien est de même pour tout coffre de tournée, pièce de décor, praticable, fauteuil, table de banquet, chariot de traiteur, provision du ter et mobilier extérieur.
Afin de rejoindre le niveau du sous-sol du presbytère, d'aménager la fosse de l'ascenseur et de permettre le passage de l'escalier d'issue/service sous le débarcadère de l'avenue Frédéric-Hébert, une zone très délimitée sera excavée entre les fondations existantes de l'église et du presbytère. Des parois de béton ceinturant l'escalier et l'ascenseur assureront la résistance au feu requise ainsi que la capacité portante nécessaire pour recevoir certains équipements de mécanique en toiture. Dissimulés par des écrans architecturaux, d'autres équipements de mécanique seront déposés sur les toitures à bassin à l'arrière de l'église, à distance de la scène pour éviter les bruits et vibrations. Ces équipements seront aisément accessibles par la mezzanine de rangement.
APPROCHE SCÉNOGRAPHIQUE : UNITÉ DE LIEU
Le maintien de l'escalier extérieur de l'église ne va pas sans la conservation de la nef et de son portique d'entrée, le narthex, afin d'en préserver les caractéristiques spatiales les plus éloquentes et de conserver leur rôle et leur fonctionnement. Bien que transformés et adaptés à la vocation de spectacle, nef et portique demeureront lisibles et évocateurs pour tous les spectateurs/visiteurs et participeront pleinement au renouveau de l'édifice.
Dès nos premières réflexions sur place, il nous est apparu essentiel d'unifier la salle et de l'affranchir d'un balcon peu convivial, car éloigné de la scène, difficilement accessible et peu performant en termes de confort visuel et acoustique. Nous avons plutôt opté pour la réunion des 200 places dans un espace unique, plus vaste, plus dégagé et au décor plus enveloppant. Cette approche simple et rigoureuse élimine les mauvais sièges d'autrefois et permet des configurations de salle variées (configurations bifrontale et défilé de mode, par exemple), en utilisant les mêmes praticables et les mêmes sièges. En plus de rendre la salle plus versatile, le fait de regrouper ainsi les sièges libère de l'espace pour les accès latéraux et pour l'aménagement d'un véritable foyer, digne du lieu et de sa vocation. Notre stratégie organisationnelle consiste enfin à regrouper dans un seuil de transition acoustique, perpendiculaire à la nef, les sas et escaliers internes de jonction qui desserviront le haut de la salle en configuration frontale. Ce seuil sépare et isole totalement les activités du foyer de celles dans la salle. Les spectateurs retardataires pourront donc accéder à la salle par ces escaliers et rejoindre leur fauteuil par le haut, sans bruit et sans passer devant la scène.
Le regroupement des sièges et l'aménagement d'une bande de circulation perpendiculaire nous permettent d évider les murs, planchers et plafonds du balcon jusqu'à la structure du toit. Seules les poutres qui rattachent la façade et les colonnes qui supportent le clocher seront conservées, afin d'assurer l'intégrité structurale et de participer à la redéfinition du nouveau foyer. L'espace récupéré est étonnant par sa verticalité et par l'abondance de lumière provenant des fenêtres et portes existantes (désormais vitrées) et des nouveaux percements dans les oeils-de-boeuf. Foyer et palier supérieur de l'escalier extérieur constitueront ainsi un espace intérieur/extérieur continu, aussi convivial qu'inattendu.
Dans le foyer, au-dessus du bar, on découvre ainsi une passerelle publique qui se déploie surtout le périmètre de la pièce. Accessible par les escaliers de jonction, elle offre un parcours lumineux et abondamment vitré, d'où les spectateurs jouiront de vues en plongée sur le foyer durant l'entracte. Le nouveau foyer, plus appropriable et adaptable, deviendra en quelque sorte un autre lieu de spectacle. On peut y imaginer par exemple un groupe d'une quarantaine d'enfants - certains sur la passerelle, d'autres en contrebas - profitant d'un spectacle circassien ou d'un mini-concert de piano, ou encore dialoguant avec des acteurs ou un animateur-conférencier. On pourra aussi y créer des projections artistiques, sur le mur qui dissimule l'escalier vers la régie, l'inonder d'effets de lumière au moyen de projecteurs de scène répartis dans l'espace ou, au contraire, déployer des rideaux de scène à son périmètre pour l'assombrir et en tirer parti d'autres manières.
CONCLUSION : POLYVALENCE ET FLEXIBILITÉ DES ESPACES PUBLICS
Le parti architectural proposé ici matérialise nos idées conceptuelles initiales. Il permet d'aménager quatre lieux de spectacles autonomes et transformables, qui peuvent fonctionner simultanément et de façon indépendante : l'esplanade urbaine, la salle de spectacle, la salle de répétition et le foyer. Icône du nouvel Agora des Arts, la bande de lumière (avec son escalier, ses rampes et son ascenseur multitâches) y joue un rôle crucial de répartiteur des publics et des activités.
(Tiré du texte du concurrent)
2.1- BGLA/T/JP:
2.1.1- La proposition offre une salle de spectacle très fonctionnelle et performante où comme mentionné par le concepteurs, chaque siège est un bon siège. En ce sens, la proposition d'éliminer le jubé pour y placer le foyer apporte plusieurs bénéfices.
2.1.2- Les fonctions proposées en façade sont pertinentes afin d'offrir des espaces animés et visibles de la rue.
2.1.3- La proposition de reconstruire l'escalier extérieur et d'offrir un nouveau parvis est un geste louable et respectueux du patrimoine, quoiqu'il induise une confusion quant à la détermination de l'entrée principale. La solution de simplement retirer cet élément a cependant soulevé certaines questions.
2.1.4- La marquise proposée sur la rue Murdoch offre un abri intéressant contre les intempéries. Cependant, elle coupe quelque peu l'accès au jardin et en réduit son intégration à l'ensemble.
2.1.5 - La facture architecturale du nouveau volume avec le long mur rideau proposé exprime peu le caractère culturel du bâtiment alors que la transparence de sa matérialité sera effective le soir, mais non le jour. Le traitement de la jonction avec l'église aurait avantage à être amélioré.
2.1.6- Le long déambulatoire longeant le côté de l'église offre un lien qui n'est pas entièrement optimisé avec l'église et demeure un espace de circulation difficile à habiter.
2.1.7- Le positionnement proposé pour l'ascenseur est passablement éloigné de l'accès principal et amène le public à côtoyer des zones plus techniques et privées.
2.1.8- La proposition de réduire à un seul ascenseur/monte-charge est intéressante pour rationaliser les coûts de construction, mais élimine toute option de rechange en cas de bris.
(Tiré du rapport du jury)
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