Chaque année, le secteur du bâtiment génère environ 39 % des émissions mondiales de CO2. En 2020, ce secteur représentait environ 10,8 % de la production totale de carbone au Québec. Sur la durée de vie d'un bâtiment, environ 43 % de la consommation totale d'énergie est liée à son fonctionnement, tandis que 50 % correspond au carbone intrinsèque des matériaux et seulement 5 à 7 % est liée à la construction. L'énergie intrinsèque ou le carbone intrinsèque fait référence à toutes les sources d'énergie et à tous les systèmes impliqués dans l'extraction, la production et le transport des matériaux de construction. En termes de consommation de ressources, il est dans notre meilleur intérêt de préserver et de réutiliser tous les matériaux à forte teneur en carbone au-delà de leur usage initial. Considérer notre environnement bâti comme une source d'accumulation de matières dans laquelle nous pouvons puiser est au coeur des principes du réemploi. L'Inventaire urbain s'inscrit dans cette logique en proposant un système de revalorisation des matières résiduelles par le biais du réseau d'écocentres existants de Montréal.
L'écocentre La Petite-Patrie est le plus achalandé des 7 écocentres de l'île de Montréal, ayant reçu environ 247 900 visites en 2015. En 2004, le centre a accueilli environ 63 000 visiteurs, apportant 15 000 tonnes de résidus mixtes, dépassant ainsi sa capacité de 12 000 tonnes par année. En 2021, l'écocentre a reçu environ 41 000 tonnes de déchets de construction, rénovation et démolition (CRD) et plus de 50 000 tonnes de déchets domestiques. Les écocentres saturés ont souvent recours à l'envoi de conteneurs non triés vers des centres de tri industriels qui, eux aussi, ont atteint leur pleine capacité. Les centres de tri ne font que déplacer et ralentir l'arrivée des déchets de CRD dans les sites d'enfouissement, ce qui indique que les résidus de CRD doivent cesser de transiter d'un centre à l'autre afin de permettre un tri méthodique et efficace des matières. Cependant,les matériaux qui composent nos villes sont profondément hétérogènes et imprévisibles, ce qui nécessite des changements de comportement et de nouvelles interventions particulières lors des phases de conception, de construction et de démolition. En l'absence de mesures incitatives concrètes pour encourager les constructeurs à séparer les résidus de CRD, notre système actuel de gestion des déchets est largement souséquipé, ce qui a pour effet d'augmenter les besoins en enfouissement.
L'inefficacité du système de tri des déchets au Québec présente une opportunité pour repenser la gestion de ces matériaux en termes de réhabilitation, plutôt qu'en termes de recyclage et d'enfouissement. Le reconditionnement et le réemploi des matériaux de construction au Québec se heurtent pour le moment à quelques défis en termes d'adoption à grande échelle : les limitations techniques sur les chantiers, les techniques de récupération, garantie légale, la logistiques qui en faciliteraient l'accès, ainsi que la restauration et la redistribution de ces matériaux.
Aujourd'hui, les réussites en matière de réemploi urbain à Montréal ne sont guère remarquables ni excitantes, pourtant le réemploi peut potentiellement être mis en oeuvre à l'échelle municipale ou provinciale. Ce changement de paradigme peut être réalisé en réunissant une multitudes d'acteurs et d'initiatives locales sous un même réseau grâce à une optimisation des écocentres existants dispersés dans la région métropolitaine de Montréal. L'objectif est d'introduire un système permettant la collecte et le catalogage de l'environnement urbain, en transformant les matières résiduelles de l'industrie du bâtiment en ressources publiques, tout en reliant les acteurs essentiels pouvant faciliter la remise en circulation des matériaux de réemploi. L'emplacement de l'Ecocentre sur le site de l'incinérateur est loin d'être une coïncidence, puisqu'il représente près de 100 ans d'histoire en matière de gestion des déchets. Un inventaire urbain représenterait la continuité évidente de cette tradition de traitement des matières résiduelles.
(Tiré du texte du concurrent)
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