Autrefois reconnus et utilisés comme des machineries modernes de la gestion des déchets, les incinérateurs des Carrières et Dickson apparaissent désormais comme des ruines urbaines. Pourtant, ces deux édifices industriels, incarnation des premières innovations technologiques et sociétales, pourraient encore jouer un rôle dans la transition sociale et environnementale. Les imposantes cheminées, surplombant les quartiers résidentiels et industriels, sont devenues des repères visuels pour les Montréalais, auxquels ils sont particulièrement attachés. « C'est notre vieille cathédrale », résume un résident de Rosemont, soulignant ainsi leur dimension patrimoniale.
Notre proposition vise à sauvegarder l'identité visuelle et architecturale de ces bâtis, tout en effaçant les frontières physiques qui les séparent des quartiers environnants. Plus que de simples points de repère, ces cathédrales modernes invitent les Montréalais à s'emparer des lieux, les occuper selon les désirs et les besoins, dans une démarche des communs, où la gestion collective permet de créer un lieu de rencontre et d'innovations citoyennes. Elles incarnent ainsi la transition entre un passé industriel en déclin et un avenir collectif plus durable.
L'incinérateur des Carrières s'est métamorphosé en un lieu vibrant et inclusif où la communauté de Rosemont reprend son souffle. Le bâtiment est maintenant un lieu d'échange et d'appropriation temporaire. Les activités circulent, s'enchaînent, s'entremêlent, au gré des désirs des citoyens. Les vastes espaces créés sont devenus des ateliers où l'on apprend à réutiliser les matériaux et objets autrement jetés. Les connaissances se partagent, les savoir-faire circulent, et l'idée même du déchet devient ressource. Ce lieu est une école d'un nouveau genre, un lieu de sociabilisation puissant, où les pratiques de réutilisation prennent vie, où les habitants, de tout âge et horizon, viennent découvrir les gestes qui fabriquent le futur.
L'architecture brute du lieu a été conservée, un clin d'oeil au passé irréversible où les camions grimpaient la longue rampe circulaire pour déverser leurs déchets. Aujourd'hui, cette rampe, verte et foisonnante, est un chemin de mobilité active, accessible à toutes et tous. Les vélos y roulent, croisant des piétons qui flânent entre les potagers urbains que les habitants cultivent eux-mêmes. Cette promenade extérieure se prolonge au sein même du bâtiment, invitant les citoyens à déambuler au milieu des espaces aux ambiances variées.
La hauteur du bâti s'offre désormais à la vue des Montréalais qui, en admirant la ville aux mille clochers, apercevront au loin deux tours, rouges. Les tours de Dickson ont été préservées. À la manière de phares, elles étirent leurs ombres sur le Saint-Laurent. Les habitants des quartiers voisins, privés jusqu'alors de ses berges par les vastes zones industrielles et portuaires, jouissent à présent d'une proximité avec le fleuve. Autrefois utilisé comme point de récupération des déchets, Dickson est devenu un lieu de rassemblement, où les citoyens profitent de la nature urbaine foisonnante.
Ainsi, de ces sombres incinérateurs voués à la destruction, jaillit un lieu vertueux et accueillant, où tout à chacun peut profiter de sa convivialité et de son énergie pour s'inspirer, créer, partager ou bien se reposer. Ce sont des espaces où imaginer le futur est à portée de main, où la réflexion rejoint les actes simples et efficaces, où l'urbanité se fait plus sociale et engagée. En offrant la possibilité d'un renouveau aux incinérateurs, tout en se rappelant leur raison d'être, ils peuvent devenir l'incarnation d'un concept vieux comme le monde : Rien ne se perd, tout se transforme. De cette idée ancienne, nous désirons faire naître ce lieu nouveau et citoyen, dédié à la renaissance.
(Tiré du texte du concurrent)
5 numérisés / 5 accessibles
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