Un objet de mémoire
Argument conceptuel
Tel que nous l'avions annoncé à l'étape précédente, la question patrimoniale a été ici étudiée en profondeur et la présente proposition découle directement de cette réflexion. Il s'agissait en effet, d'une part, de prendre position par rapport à la direction proposée par les auteurs du programme fonctionnel et technique et reconduite par les responsables du projet lors de la visite des lieux en ce qui concerne notamment la suppression des colonnes et de l'escalier extérieur principal et, d'autre part, de considérer une à une les diverses valeurs patrimoniales que nous reconnaissons nous-mêmes pour l'ensemble du site.
Ainsi, le bâtiment de l'église, celui du presbytère, le muret de pierre, la sculpture du Christ ainsi que les grands conifères forment tous ensemble un site rempli d'histoires, de souvenirs, de messes de Noël, de baptêmes, de mariage, de décès et plus récemment de concerts et de pièces de théâtre tout aussi mémorables. À notre avis, ce sont les valeurs sociales, historiques et culturelles qui dominent le statut patrimonial de l'ensemble, sans pour autant en annuler les valeurs architecturales et paysagères qui nous apparaissent également importantes. Connu depuis plus de 85 années comme un site de rassemblement, de culture et de socialisation duquel émanent plusieurs générations de souvenirs, le site de Notre-Dame-de-Protection et de l'Agora des Arts se doit, à travers son nouvel usage, de maintenir ces valeurs intrinsèques, voire même d'en pousser le développement encore un peu plus loin. L'exercice de réhabilitation que nous proposons multiplie notamment les espaces de socialisation par la mise en oeuvre des trois nouveaux parvis extérieurs : Alors que l'espace événementiel du côté de la septième Avenue profite du dénivelé naturel du terrain pour générer un petit gradin, l'entrée principale située dans l'axe central et sur les traces de l'escalier d'origine en maintien la pleine largeur, formant ainsi un second espace public d'intérêt. Directement au-dessus, la terrasse reprend la forme du parvis d'origine et offre un complément extérieur et sécurisé au foyer intérieur à l'étage de la salle.
À l'intérieur, un foyer sur deux niveaux et le grand escalier intérieur poursuivent cette série d'espaces sociaux. Nous proposons en effet d'intérioriser et de déplacer latéralement le grand escalier symbolique de l'église - celui dont la montée permet d'effectuer une transition entre le réel tangible et la maison de Dieu - du côté du pavillon d'accueil pour le transformer en un espace de représentation liant les deux niveaux du foyer et propre à l'univers de la musique et du théâtre. En maintenant ses dimensions originales et en le rendant visible de tous les côtés à travers des parois de verre, nous sommes d'avis que le jeu demeurera à la fois visible et compréhensible. Cet ensemble architectural constitué du grand escalier et de son bar en fer à cheval situé directement au-dessous est entièrement pensé et travaillé en bois. Ses textures et les finis lustrés qui viendront le protéger feront écho aux ouvrages de bois plus ou moins modestes retrouvés dans nos églises sous formes de bancs, de chaires ou encore de confessionnaux.
Le second étage de ce nouveau pavillon d£accueil n'abrite en définitive que l'ouverture du grand escalier, une passerelle périmétrique assez large pour servir de foyer, ainsi qu'un grand puits de lumière. Entièrement tissé de maçonnerie de brique rouge allongée et assemblée sous forme de résille placée devant une paroi de verre, il irradie une lumière rougeâtre à l'extérieur le soir tout en offrant un écrin confortable voire même sensuel du côté intérieur permettant d'effectuer la transition du côté de la salle, cette fois entre l'univers du réel tangible et celui de la représentation. Agissant comme complément patrimonial au rêve initial d'un site où la brique rouge domine - tel qu'illustré dans les représentations du site antérieures à sa construction -, cette petite boîte flottante d'où émane une lumière douce met en place à la fois l'identité contemporaine du nouvel usage, un objet de transition pour un lieu consacré aux arts de la scène et un objet de mémoire en dialogue avec l'existant ainsi qu'avec le contexte urbain au périmètre.
De manière synthétique, l'argument conceptuel du projet réside dans le dialogue à plusieurs niveaux que nous tentons d'établir avec l'ensemble patrimonial existant à travers :
- Le maintien de l'accès dans l'axe de la flèche cette fois au niveau du sol.
- La reconstitution du parvis initial en toit-terrasse et création de nouveaux parvis extérieurs.
- Le maintien du paysage de conifères typique de la nature de l'Abitibi.
- Le déplacement de la statue du Christ dans un nouvel axe visuel.
- Le déplacement latéral et l'intériorisation du grand escalier et de sa fonction symbolique.
- L'ajout d'un volume suspendu et luminescent en maçonnerie de brique rouge de format allongé venant compléter la composition d'origine telle que pensée et illustrée.
Argument technique
Sur le plan technique, l'approche proposée demeure à notre avis raisonnable et tient compte du cycle de vie du bâtiment. Ainsi nous évitons de reporter des travaux d'entretien nécessaires et misons sur une technique et des systèmes qui permettront de maintenir au minimum les budgets de fonctionnement, lesquels, dans le domaine de la culture sont parfois assez minces. Aussi, dans un premier temps, nous avons pris le parti de refaire en entier les systèmes mécaniques et électriques et de remplacer les conduits, systèmes et filages par des équipements neufs plus économiques et plus faciles à opérer. En structure, nous proposons d'abord d'enlever les quatre colonnes qui gênent la scène et qui en réduisent grandement le potentiel et également de réduire au maximum celles qui demeurent dans l'auditoire. Nous avons également pris le parti de refaire la dalle sur sol en plus du plancher du rez-de-chaussée, ce qui permettra de refaire le drainage sous-dalle et d'installer des puisards collectant un nouveau système de drains français placés au périmètre extérieur et sous la nouvelle dalle. En architecture, nous viendrons refaire la membrane d'étanchéité sur périmètre de l'église, ce qui s'avère selon nous absolument nécessaire étant donné la très grande proximité de la nappe phréatique et les expériences antérieures d'infiltrations d'eau.
Sur le plan scénographique, nous respectons entièrement la proposition avancée par le scénographe du programme fonctionnel et technique tout en questionnant la prise de position pour des gradins démontables. En fait, nous comprenons l'argument budgétaire mais souhaiterions néanmoins reconsidérer la possibilité de travailler avec des gradins télescopiques si, au terme d'un chantier sans heurt, des argents demeurent disponibles. Ceci augmenterait grandement la flexibilité de la salle tout en diminuant à court et moyen terme les coûts d'opération.À noter également que les salles de répétition au sous-sol ont été bonifiées par rapport au programme d'origine puisque la salle principale est dénuée de ses colonnes embarrassantes et constitue une véritable boîte noire alors que la seconde est plus vaste que prévue.
Argument économique
Sur le plan économique, nos expériences récentes de ce type de projet nous indiquent d'une part qu'il demeure sage d'effecteur un lot de démolition sélective et de curetage avant de se lancer dans le projet de construction afin d'offrir à l'entrepreneur principal un chantier entièrement dénué de surprises coûteuses en temps comme en argents. La refonte complète des systèmes électriques et mécaniques permettra également de minimiser les problématiques en chantier, souvent causées par du bricolage ou des économies de bout de chandelle. Enfin, notre étude du contexte règlementaire semble également ouvrir la voie vers des solutions plus simples que celles anticipées nous permettant de sauver les ressources initialement dirigées vers la reconstruction du lien et la mise en place d'un mur coupe-feu et les rediriger vers la qualité architecturale du pavillon d'accueil.
Considérations patrimoniales
Réhabilitation :
«Action ou processus visant à permettre un usage en continu ou contemporain compatible avec le lieu patrimonial ou avec l'une de ses composantes tout en protégeant la voleur patrimoniale du lieu »
-Normes et lignes directrices pour la conservation des lieux patrimoniaux ou Canada (2010)
Argument patrimonial
L'objectif patrimonial principal poursuivi par l'agrandissement de l'ensemble est d'en conserver les valeurs d'origine qui ont su perdurer jusqu'à notre époque tout en établissant un dialogue avec l'histoire du site et de son ancien usage. Il s'agit ici d'un travail de réhabilitation conformément à la définition qu'en donne les lignes directrices citées ci-dessus. Ce dialogue se développe par une série d'interventions simples qui touchent tout autant les aspects matériels (utilisation contemporaine de la maçonnerie), symboliques (conservation de l'axialité de l'église, mais translation de l'escalier) que culturels (multiplication des parvis comme lieux de rencontre et de représentation).
Valeur sociale d'usage
L'Agora des Arts poursuit La vocation sociale de ['ensemble en conservant et en amplifiant ses espaces de rencontre et de rassemblement.
- Les nouveaux parvis extérieurs permettent à la population de s'approprier le site et de l'utiliser comme véritable espace public de socialisation et de rassemblement.
-Le nouveau parvis surélevé, lié au foyer de l'étage, se transforme en espace de représentation et de diffusion ouvert sur la ville.
Valeur culturelle et historique
À l'origine conçu comme lieu de communion et de recueillement, l'édifice converti et agrandi devient maintenant un espace de création, de diffusion et de représentation. Cette transformation met en perspective l'importance culturelle historique du site tout en assumant la mutation des activités qui s'y déroulent.
-Les nouveaux usages maintiennent l'aspect public du lieu tout et conservent la vocation d'espace grandiose, voir sacré, permettant d'établir une distance, un détachement avec le quotidien.
-Dans ce nouveau contexte, la conservation d'éléments patrimoniaux d'origine, tels quels, déplacés ou réinterprétés permet à l'usager de redécouvrir l'ensemble tout en mettant en évidence la relation que ces éléments (escalier, monument, axialité, etc.) entretenaient avec l'immeuble dans sa vocation d'origine.
Valeur architecturale
L'ensemble d'origine, autrefois pensé entièrement en maçonnerie, est maintenant complété avec l'ajout d'un nouveau pavillon d'accueil.
-Tout en conservant la matérialité de l'ensemble idéalisé, le pavillon déploie la maçonnerie de manière contemporaine, légère et toute en transparence. Cette utilisation du matériau permet d'assurer l'intégration au site, de poursuivre le projet d'origine, tout en affirmant sa réalisation postérieure aux autres édifices, ainsi que et sa vocation distincte, découlant du nouvel usage.
-L'escalier extérieur, servant autrefois de parvis, est maintenant translaté et intériorisé. Cette opération permet de maintenir l'axe central de l'église comme accès principal à l'intérieur, mais aujourd'hui de plain-pied en offrant une vue directe sur le niveau bas de l'église autrefois beaucoup plus opaque. Cette modification du parcours permet à l'usager de répéter les mouvements d'origine, mais dans un tout nouveau contexte.
(Tiré du texte du concurrent)
2.3-CM
2.3.1- La réflexion patrimoniale ayant servi d'assise à la conception de la proposition a été menée de façon claire et avec sérieux.
2.3.2- Le traitement architectural en lien avec la répartition fonctionnelle proposée est particulièrement cohérent.
2.3.3- La pérennité de la proposition quant à sa matérialité est convaincante.
2.3.4- La résille de maçonnerie proposée pour le nouveau pavillon est un élément distinctif intéressant. Cependant, son traitement actuel confère au nouveau pavillon un aspect massif et quelque peu austère. Le jury concède néanmoins que l'objectif de créer un effet lanterne en période d'obscurité est prometteur et promet d'adoucir la lourdeur de l'ensemble.
2.3.5- Les espaces de circulation proposés à l'intérieur du nouveau pavillon sont passablement étroits et peu généreux, et ce, à chacun des étages. l'ensemble gagnerait à être légèrement agrandi.
2.3.6- L'escalier monumental traité comme un pièce d'ébénisterie offre une présence certaine de l'ensemble à partir de la rue.
2.3.7- Peu de détails ont été fournis quant à la matérialité de la salle de spectacle, hormis les précisions apportées lors de l'audition.
(Tiré du rapport du jury)
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- Planche de présentation
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- Perspective
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- Plan d'implantation
- Plan
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- Coupe
- Coupe
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- Élévation
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- Légende
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- Schéma
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