GABRIELLE-ROY RÉINVENTÉE:
Un espace public parsemé d'objets attractifs et habitables
La réactivation d'un espace public au centre-ville.
Naturellement, de par sa position centrale dans le quartier St-Roch, entre deux églises et au point de convergence des diverses populations du secteur qui y habitent, travaillent ou encore y transitent, la bibliothèque Gabrielle-Roy constitue un carrefour important du centre-ville. L'îlot Jacques-Cartier est traversé chaque jour par des milliers d'individus pour lesquels Gabrielle-Roy constitue un point de repère. Historiquement, ce secteur de la ville aura toujours été, du moins durant plus d'un siècle, un lieu dynamique, populaire et achalandé. Dans le cadre du présent projet, nous proposons de poursuivre dans le sens naturel de l'organisation urbaine historique et actuelle et d'accueillir convenablement cette convergence, voire même de l'amplifier, afin de redonner au quartier un espace public de qualité comme ce fut le cas à l'époque de la place du marché et de la place Jacques-Cartier.
Les espaces publics qui se sont succédés sur l'îlot Jacques-Cartier auront constitué durant plusieurs années des foyers d'échanges sociaux, commerciaux et culturels d'importance. À l'instar de ces derniers et au même titre que d'autres lieux publics actuels comme les centres commerciaux ou les gares, la bibliothèque ici proposée reprend, dans la configuration de son rez-de-chaussée, la figure urbaine de la place Jacques-Cartier. L'analyse typologique de cette place permet en effet de comprendre qu'en bloquant les quatre coins d'une place - ici par des îlots de verdure - tout en dégageant des allées centrales sur chacun de ses côtés, les visiteurs n'ont d'autres choix que de converger naturellement vers le centre et d'aller à la rencontre du monument de Jacques-Cartier, mais aussi et surtout des uns et des autres. Cette manière de structurer l'espace public s'avère non seulement historiquement juste dans le contexte, mais également efficace pour mettre en oeuvre une très grande perméabilité sur l'îlot dans son ensemble ainsi qu'au rez-de-chaussée de la bibliothèque tout en s'assurant d'amener naturellement la population au coeur de cette dernière pour lui offrir, une fois arrivée, des parcours multiples et personnels.
Les quatre entrées
Ce plan cruciforme dans lequel les coins sont « bloqués » par des foyers ou des services, offre une grande perméabilité, d'abord par la transparence de l'enveloppe qui le ceinture, mais surtout par la possibilité qu'il offre aux visiteurs d'accéder à l'intérieur de la bibliothèque par l'une des quatre entrées aménagées sur chacun des murs limitrophes du bâtiment. Ainsi, par la rue Saint-Joseph en passant sous un soffite lumineux et technologique, le visiteur entre en contact avec le foyer de vie citoyenne et celui de la bande dessinée, il comprend dès son entrée que le parcours de la journée sera celui de son choix puisque, sans compter les ascenseurs, trois objets distinctifs et singuliers s'offrent à lui sous forme d'escaliers pour le mener aux divers foyers supérieurs. Du côté de l'entrée nord, la rue du Roi se trouve désormais animée par un rez-de-chaussée tout aussi perméable et transparent, lequel se prolonge sur un parvis surmonté d'une marquise. Ces lieux vécus autrefois comme une arrière court pourront désormais être animés par la petite scène du foyer (adjacente à l'extérieur) et une partie des espaces d'animation du foyer jeunesse. Directement au-dessus, la salle de diffusion et son foyer donnent également vie à la rue tout en se plaçant en relation avec la nouvelle maison de la danse de l'autre côté de la rue. De la place publique, pour laquelle nous proposons de réactiver physiquement et symboliquement l'ancienne ruelle des archives et de l'animer par une allée de bouquinistes, une série de bancs et un alignement d'arbres, il est aussi possible d'atteindre le coeur du rez-de-chaussée. D'ailleurs, c'est le long de cette allée qu'il est également possible d'apercevoir le convoyeur à l'oeuvre et d'effectuer le retour de documents à la chute intelligente. Enfin, si la proposition d'inverser les espaces des archives et ceux des bureaux administratifs était éventuellement retenue, cette entrée, qui est pour l'instant celle privilégiée pour les employés, pourra également devenir l'entrée du centre d'archives, ce qui compléterait de manière cohérente la réactivation de l'ancienne ruelle des archives en espace public linéaire. Enfin, la quatrième entrée donnant sur l'atrium de la CSQ pourra être utilisée de manière contrôlée et sporadique pour l'accueil des groupes scolaires, puisqu'elle ouvre directement sur le foyer jeunesse et sur l'espace d'animation qui leur est consacré.
De manière générale donc, le rez-de-chaussée s'organise comme une place publique traditionnelle stimulant la convergence et les échanges en orientant d'entrée de jeu les circulations vers un centre contrôlé duquel tout un chacun peut ensuite construire son propre parcours. La très grande perméabilité ici proposée se fait néanmoins en considérant les contraintes relatives à la sécurité des lieux et à la gestion des emprunts. Aussi bien que pouvant investir le rez-de-chaussée de toutes parts, le passage devant le poste de sécurité, le poste d'accueil ou encore le poste d'information demeure obligé. Par leur position stratégique au centre du plan et la vue qu'ils ont sur chacune des entrées, les trois postes forment un triangle de surveillance sans que la perception de cette stratégie soit oppressante. Il est également proposé que toute la bibliothèque soit un lieu sécurisé et qu'il n'existe pas de frontière interne entre espaces sécurisés et non sécurisés. Pour ce faire, l'expérience démontre que les portillons de sécurité doivent être placés le plus en amont possible (aux entrées) et que des postes auto-prêts à proximité des sorties minimisent les oublis en même temps qu'ils contribuent à renforcer rôle dissuasif des portillons. Enfin, pour compléter les mesures de sécurité, certains rideaux métalliques dissimulés et stratégiquement positionnés ainsi que quelques modules de rayonnage mobile, permettent d'opérer certains secteurs en dehors des heures d'ouverture tout en conservant certains autres fermés.
Les centres multiples
Afin de proposer une bibliothèque nouvelle et avant-gardiste qui s'éloigne des modèles traditionnels et contemporains où toute l'énergie est mise sur un seul espace central, spectaculaire et dont l'apparente complexité est souvent superflue, nous avons réfléchi sur une manière architecturale de matérialiser une bibliothèque qui se caractérise principalement par la présence de plusieurs centres et qui fonctionne davantage comme un rhizome que comme un système nerveux central. Un lieu qui dépasse la mise en scène unique pour éclater le spectaculaire en plusieurs centres d'intérêt. Nous avons bien entendu pensé à prendre les espaces d'animation de chacun des foyers comme point de départ. Il s'est toutefois rapidement avéré que ces derniers constituaient des espaces superposés horizontalement dans une structure existante et en fin de compte difficile à caractériser autrement que de manière superficielle parce que souvent trop vastes ou encore tributaires de leur éventuelle programmation. Les liens verticaux par contre, escaliers, gradins et ascenseurs nous sont apparus comme des dispositifs architecturaux beaucoup plus puissants ayant le potentiel de tisser des liens entre les espaces d'animation des divers foyers sans nécessairement avoir à toujours repasser par le centre de l'immeuble. Pensés comme des dispositifs à la fois fascinants, habitables et surtout appropriables, ces liens verticaux concentrent sur eux-mêmes une grande partie de l'identité d'un foyer tout en le projetant vers un autre. Stratégiquement positionnés dans des ouvertures pratiquées à même les planchers de la bibliothèque existante, ils s'appellent les uns les autres générant par la même occasion une multitude parcours possibles et laissant au visiteur le soin de créer son expérience.
Les objets de désir
Ces objets de désir, comme nous les avons ici nommés, se déclinent de diverses manières selon le rôle qu'ils ont à jouer dans la composition générale et selon les foyers qu'ils mettent en relation. Ils se présentent chaque fois, par leur dimension inusitée, comme de véritables intrigues. Par exemple, l'escalier très droit et très robuste du secteur de la bande dessinée - proposé entièrement et uniquement en maçonnerie de briques - se rattache par sa modularité et sa texture matérielle à l'univers de la bd tout en constituant un objet de mémoire légèrement anachronique lorsque l'on pense à l'actuelle bibliothèque Gabrielle-Roy ou encore qui demeure tout à fait dans le ton lorsque l'on pense à la texture générale du quartier St-Roch. Muni d'alcôves et de banquettes insérées à même sa géométrie, et se projetant vers l'espace d'animation du foyer de création, il tisse des liens entre deux foyers connexes, intimement liés par la créativité et l'imaginaire. Dans un certain sens, l'escalier de brique cristallise en lui-même l'intime parenté des deux foyers. À la sortie de cet escalier, en glissant vers le gradin du foyer de création qui semble plonger vers la rue, de nouveaux choix s'offrent au visiteur qui aura opté pour ce parcours. Au loin, il apercevra l'escalier hélicoïdal qui habite le foyer de la salle de diffusion et qui pourra le mener au foyer voyage, lui-même proche parent d'un espace voué au spectacle, souvent synonyme d'évasion. Plus près de lui, l'escalier monumental tout en laiton qui permet de passer du foyer de musique et cinéma au foyer de langues et littératures. Ce dernier ressemble d'ailleurs étrangement à un morceau de trombone géant déplié et tordu auquel se greffent places assises, postes de travail et postes informatiques tout en libérant une grande ouverture circulaire. De fil en aiguille, les dispositifs se succèdent ainsi jusqu'aux terrasses du troisième niveau et à chaque fois, un choix est à faire, une nouvelle expérience appelle le visiteur et l'objet qu'il choisit de fréquenter constitue non seulement un objet de transition mais aussi un objet social puisque toujours habité.
Les espaces d'animation : l'auto-marketing de la bibliothèque
Afin que la bibliothèque puisse, en quelque sorte, effectuer son propre marketing en mettant en vitrine l'éventail des activités qui s'y déroulent, les espaces d'animation ponctués de leurs objets attractifs et habitables ont tous été placés de manière stratégique près de l'extérieur. Ainsi, par exemple, le foyer culinaire, nouveau et intrigant occupe un des secteurs les plus visibles de toute la bibliothèque, soit directement au coin de la rue Saint-Joseph et de la future place Jacques-Cartier. Pouvant déborder naturellement sur la place ou être transformé en boutique culinaire éphémère lors de certaines occasions, ce nouveau programme, qui risque par ailleurs d'être fort populaire, constitue en quelque sorte un foyer emblématique de la nouvelle Gabrielle-Roy. Alors que la rue du Roi n'est pas en reste avec la présence animée du foyer de la salle de diffusion, de la salle de formation et de l'atelier des sciences et technologies, la rue Saint-Joseph obtient tous les autres foyers d'animation, qu'il s'agisse du gradin du foyer de création, du foyer culture et sociétés ou encore des terrasses du foyer nature, sciences et technologies. Toute la bibliothèque, incluant certains des plus importants dispositifs attractifs, se met en vitrine et présente à la rue un lieu grouillant d'activités diverses.
Géométrie et texture matérielle de l'ensemble
Deux idées maîtresse ont guidé le développement de la géométrie proposée ainsi que la texture générale de l'ensemble. Dans un premier temps, afin d'ajouter de la profondeur au projet, nous avons souhaité conserver une partie de l'âme de la bibliothèque Gabrielle-Roy initiale afin d'imbriquer symboliquement et matériellement le souvenir de cette première bibliothèque dans la seconde et d'en conserver une présence. Ainsi nous proposons par exemple de nettoyer et de boucharder à l'occasion le squelette de béton d'origine afin de profiter de la texture naturelle de ce dernier et la mettre ainsi en contraste avec des détails contemporains simples et précis confectionnés à partir de bois, de laiton, de verre teint, de plâtre et de textures acoustiques. Afin de poursuivre cette idée au niveau de l'enveloppe, nous proposons aussi d'insérer dans les nouveaux murs rideaux, une série de panneaux d'aluminium peints et embossés qui reprennent de manière fragmentaire certains motifs caractéristiques de la bibliothèque initiale dont la composition brutaliste fut certainement à l'origine très affirmée et très contrastée dans le tissu urbain existant. Ces motifs, ouvertures carrées, fenêtres en bandeaux ou encore diagonales ainsi que les encorbellements, apparaissent sporadiquement, de manière très douce, quasi fantomatique derrière un mur-rideau translucide rappelant une certaine présence tout en adoucissant la composition d'ensemble par une très grande transparence. L'enveloppe cristallise et concentre en quelque sorte ce souvenir. Dans un deuxième temps, nous avons opté pour une géométrie simple et en strates, très légèrement décalées et dont la distinction est accentuée par des niveaux de transparence et des jeux d'éclairage interne et de sérigraphie. La première est par ailleurs légèrement reculée afin d'offrir un soffite lumineux pouvant se transformer en véritable écran à l'horizontale diffusant images et informations et affirmant l'importance de la bibliothèque comme élément central du pôle technologique du quartier St-Roch. La dernière strate est également reculée afin de dégager des terrasses coté soleil et donnant sur la plus belle vue du secteur, celle de la falaise, de la vielle ville et du quartier St-Sauveur. De manière générale cette stratégie, permet de minimiser la monumentalité de l'ensemble et de rapprocher la bibliothèque de la rue et de la population, notamment par la présence en porte-à-faux des deux étages directement au-dessus du rez-de-chaussée avec leur activité grouillante.
La réalisation
La réalisation éventuelle du projet de la bibliothèque Gabrielle-Roy constitue un défi technique et budgétaire. La stratégie de projet ici proposée permet de penser qu'il pourra être relevé avec confiance. En limitant les interventions majeures à la structure existante, à la mise en place de deux poutres de transfert pour la salle de diffusion et à certaines ouvertures pratiquées entre les abaques tout en s'abstenant d'intervenir massivement niveau de l'appentis ou encore de générer des complexités géométriques, nous sommes d'avis que l'énergie est déployée au bon endroit, c'est-à-dire dans l'expérience du visiteur qui se veut variée à chaque visite et remplie de nouvelles découvertes. Une connaissance approfondie de la part de notre équipe sur la manière dont on peut opérer agréablement, efficacement et de manière sécuritaire une telle bibliothèque, conçue comme un espace public perméable, comme une petite ruche bourdonnant d'activité, nous permet de prétendre pouvoir en faire un succès de processus comme un succès de fréquentation à sa réouverture.
(Tiré du texte du concurrent)
CM/ABCP
2 .3.1- La proposition est modeste, principalement en ce qui concerne le traitement et la volumétrie extérieure. Cela apporte crédibilité et confiance quant au respect budgétaire. Le traitement extérieur relativement neutre n'affiche cependant pas d'emblée la présence d'une bibliothèque. Cette sobriété de traitement peut affecter le potentiel de revitalisation du quartier et d'animation de la rue.
2.3.2-. De façon globale, la proposition respecte toutes les exigences du PFT en matière de distribution fonctionnelle.
2.3.3- L'intérieur propose une expérience spatiale très riche grâce au vocabulaire diversifié des escaliers. La décentralisation de l'effet spectaculaire constitue une approche étonnante et digne d'attention.
2.3.4- Les quatre entrées proposées, avec le plan cruciforme des circulations au niveau RC, créent un problème pour le contrôle des documents. Malgré les portiques de détection, il serait impossible pour le personnel de pouvoir intervenir rapidement sur les 4 entrées à la fois. Le niveau du RC, avec ses nombreuses circulations, risquerait de devenir un espace de transit ou un raccourci pour les piétons circulant à proximité du bâtiment.
2.3.5- La décentralisation des éléments d'intérêt architecturaux injecte une complexité organisationnelle aux plans, diminuant ainsi la clarté de la proposition.
2.3.6- Les nombreux escaliers proposés comme éléments identitaires (« objets de désir ??) offrent une belle diversité de parcours tout en les enrichissant. Cependant, leur emprise au sol et les nombreuses circulations du niveau RC ont un impact évident sur les superficies octroyées aux foyers de ce niveau, qui sont déficitaires.
2.3.7- L'importance accordée à ces escaliers est discutable puisque ceux-ci sont souvent sous-utilisés par rapport aux ascenseurs.
2.3.8- La présence des nombreux escaliers à travers les foyers limite la flexibilité et les possibilités de réaménagement des espaces, et ce, à chacun des niveaux.
2.3.9- L'absence de lumière naturelle au niveau SS1 diminue la qualité de cet environnement de travail. Aucune proposition n'a été faite pour pallier ce problème.
(Tiré du rapport du jury)
48 numérisés / 48 accessibles
- Planche de présentation
- Planche de présentation
- Planche de présentation
- Perspective
- Perspective
- Perspective
- Perspective
- Plan d'implantation
- Plan d'implantation
- Plan
- Plan
- Plan
- Plan
- Plan
- Plan
- Coupe
- Élévation
- Élévation
- Élévation
- Détail de construction
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma
- Schéma