Un concours sur l'intangible
Initié par le Gesù Centre de créativité en partenariat avec le quartier des spectacles et Design Montréal, ce concours d’idées tenu en 2008 offrait un défi central, tant pour les concurrents que pour le jury : la lumière en architecture. Plus précisément, l’artifice de la lumière. Il est vrai qu’au départ, le projet répond à une nécessité : blotti dans l’ombre de la rue Bleury, le Centre de création du Gésù manque de visibilité. Il lui faut un signal pour affirmer sa présence. C’était le prétexte pour aborder une thématique riche, liant religion et spectacle, dont les projets soumis se sont inspirés. Du spectacle, l’image des feux des projecteurs et des mises en scène. De l’église, le spectre de son inachèvement ou l’envie d’aider à lire son architecture. De la religion, plus rarement évoquée, la lumière... divine ! Mais ces pistes thématiques qui ont nourri la majorité des projets comportaient des risques : au lieu de l’intangibilité, l’envahissant d’une mécanique sophistiquée pour assurer l’éclairage ; la surenchère d’une vision mercantile aux dépens du caractère religieux ; ou, pour certains, l’oubli que la lumière n’existe que lorsqu’elle caresse ou qu’elle frappe la matière.
Ce remarquable potentiel imaginaire explique en grande partie le succès de ce concours, 37 soumissions à une échelle internationale pour, somme toute, un petit projet. Il faut aussi souligner le mérite du maître d’œuvre, le centre de créativité du Gesù, qui a reconnu dans la formule du concours d’idées, ouvert à tous, sans restriction, un moyen de faire valoir sa propre mission : l’exploration artistique. Qui plus est, l’expérience témoigne de la valeur collective des concours. En exposant les projets, en les soumettant à un vote populaire et en présentant les choix du jury dans un forum, le concours est devenu un espace événementiel qui réhabilite le dialogue et l’action sur la question de l’architecture publique. La formule, déjà utilisée par Design Montréal à d’autres occasions et habilement menée, a dévoilé encore une fois la richesse de ce processus de transparence, aux antipodes de l’opacité de la majorité des grands projets publics qui évitent de donner lieu à des concours. La lumière de ce modeste concours est aussi là.
(Consultez les projets des concurrents pour les commentaires spécifiques du jury)