détour
Le réseau de transport public a toujours été lié à notre expérience de la ville. Quotidiennement, il aspire des centaines de milliers de personnes puis les relâche aux quatre coins du tissu urbain. Or, la crise sanitaire s'est emparée de l'espace public, l'espace de tous, pour le rendre complètement étranger; elle a transformé le transport collectif en un lieu à éviter. Ce faisant, elle a aussi renforcé une tendance à voir la ville comme un territoire à fuir, un lieu trop hostile. Occuper l'espace urbain est devenu un risque à ne plus prendre.
La covid-19 a affirmé sa propre spatialité. Entre nouvelles limites, contraintes physiques et distanciation sociale, elle a provoqué un éloignement. Déconnectés, isolés, nous avons perdu de vue la ville et ses habitants. Alors que nos déplacements sont réduits au strict minimum, le transport public, désenchanté, a perdu son moteur collectif.
La question se pose : Comment pouvons-nous penser le trajet d'autobus pour redynamiser notre rapport aux déplacements urbains, pour combler le fossé qui s'est creusé entre nous et la ville ?
(Tiré du texte du concurrent)
Le jury a été séduit par la clarté et la force de cet anti-projet. La proposition intitulée Détour retourne les rigidités du transport public, habituellement de station en station prédéterminée, en une expérience insolite, indéterminée, imprévisible : monter dans le bus sans savoir où il nous mènera. La découverte de nouveaux morceaux de ville, de nouveaux quartiers s'effectue au gré des surprises. La ligne droite n'est pas une qualité, seule la dérive - au sens qu'elle avait chez les théoriciens du Situationisme - se conjugue au détour. Cette proposition ne règle pas la problématique du transport, mais l'augmente, pour ainsi dire, en créant de nouveaux liens urbains. L'idée est claire, bien rédigée et les collages ou faux collages ajoutent aux qualités de l'ensemble. La mobilité est ici conçue comme moyen de vivre ensemble, et le temps nécessaire à l'utilisation des transports publics ouvre sur l'inattendu et un nouvel imaginaire de l'expérience des transports publics. Les gestionnaires des transports publics seraient-ils en mesure d'accepter une proposition aussi simple et aussi déroutante?
(Tiré du rapport du jury)
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